Cours d’eau : c’est la morphologie qui pêche !

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N° 262 - Publié le 18 novembre 2014
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La retenue de Pont de Brec’h sur le Loch alimente en eau potable les villes d’Auray, de Quiberon, de La Trinité-sur-Mer...
Elle est faiblement affectée par l’eutrophisation grâce à l’étang de la Forêt, situé plus en amont et qui existe depuis le Moyen Âge.

Après la qualité de l’eau des rivières, c’est leur morphologie qui est maintenant pointée du doigt. Un nouveau critère à prendre en compte dans la gestion des cours d’eau.

« Demander à n’importe qui de vous parler des cours d’eau en Bretagne et c’est leur médiocre qualité physico-chimique qu’il relèvera », commente Pierre Aurousseau, président du conseil scientifique de l’environnement de Bretagne et professeur à Agrocampus Rennes.

Et bien ce n’est pas ce qui ressort de l’étude menée ces dernières années dans le cadre de la Directive cadre européenne (DCE2000).

Dans ce texte, transposé en loi française en 2006, l’Europe demande aux États membres de classer l’état des cours d’eau selon des critères physicochimiques, biologiques et morphologiques.

Et... « Les résultats sont surprenants, poursuit Pierre Aurousseau. Ils révèlent un déclassement de nos rivières principalement fondé sur les critères morphologiques et non sur les critères physico-chimiques. Ce à quoi on ne s’attendait pas ! »

La continuité écologique

Toute construction, barrage, moulin ou autre, est considérée comme un obstacle à la continuité écologique, une entrave à la remontée des espèces migratrices. La modification du tracé des cours d’eau, souvent redessiné de façon plus rectiligne, a été préconisée jusqu’à la fin des années 80 pour faciliter le drainage des parcelles agricoles en bordure de rivières. Cette diminution de la longueur a pour effet d’augmenter le débit et de diminuer la hauteur d’eau. Enfin, l’état des berges, souvent artificialisées, participe également au déclassement. Ces résultats doivent-ils pour autant conduire au rétablissement de la morphologie originelle de nos rivières ? Pierre Aurousseau cite les travaux de l’historien Gilles Billen et de son équipe, qui montrent, dans le cas du bassin de la Seine, que certains ouvrages datent du Moyen Âge. « On peut s’interroger sur la justification de vouloir revenir à un état morphologique antérieur à cette période. »

L’effet positif des retenues

Le scientifique va même plus loin. « Nous avons plusieurs exemples qui montrent l’impact positif des retenues sur les concentrations et les flux en nitrate et en phosphore. » Ce dernier est responsable du phénomène d’eutrophisation, c’est-à-dire le développement de cyanobactéries qui produisent des toxines dangereuses. La retenue favorise la décantation du phosphore et protège donc l’aval du cours d’eau et bien souvent d’autres retenues qui ont un rôle stratégique pour l’alimentation en eau potable.
« Certains critères de la DCE peuvent être contradictoires. Et aujourd’hui, il n’existe pas de règles pour gérer ces contradictions. » C’est le message que Pierre Aurousseau a voulu faire passer fin janvier, à l’occasion du 10e carrefour de l’eau, qui s’est tenu à Rennes. Le fait que la morphologie ait été le thème de plusieurs temps forts de cet événement prouve l’importance de la question. Ce débat ne fait que commencer.

Nathalie Blanc

Pierre Aurousseau
Tél. 02 23 48 54 28
pierre.aurousseau [at] agrocampus-ouest.fr (pierre[dot]aurousseau[at]agrocampus-ouest[dot]fr)

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