Pôle Sud : cent ans déjà !

Actualité

N° 274 - Publié le 25 juillet 2014
© Paul Tréguer
Terre Victoria

Océanographe à Brest, Paul Tréguer(1) signe un livre sur l’histoire humaine et scientifique de la conquête du pôle Sud.

Sciences Ouest : Qu’est-ce qui vous a motivé à écrire ce livre ?
Paul Tréguer : Tout d’abord, la date anniversaire. Si le pôle Sud a été foulé pour la première fois par le Norvégien Roald Amundsen le 14 décembre 1911, c’est en 1910 qu’il a quitté son pays, tout comme l’Anglais Robert Scott et le Japonais Nobu Shirase ! Cette date clé dans la compétition internationale pour la conquête des pôles est, je pense, assez méconnue du grand public. L’autre raison est ma passion pour cette aventure que j’ai découverte quand je me suis retrouvé sur leurs traces en 1990, lors d’une campagne océanographique en Antarctique. 

SO : Pouvez-vous nous rappeler le contexte de cette course au pôle ?
Paul Tréguer : Amundsen était très bien équipé, avec un navire idéal pour naviguer dans les glaces. En quittant la Norvège, il était censé partir pour le pôle Nord. Il n’a révélé sa véritable destination à son équipage qu’à l’escale de Madère ! Alors que tout le monde connaissait l’objectif de Scott : il devait suivre les traces de son compatriote Ernest Shackleton qui avait dû s’arrêter en 1909, à 180 km du pôle Sud. Scott reçoit le télégramme d’Amundsen lui annonçant son nouvel objectif lors de son escale en Australie. Lucidement, il réalise qu’il ne sortira pas vainqueur de la compétition. Mais sa déception a été immense quand il a aperçu le drapeau norvégien flottant au pôle...
L’exploit de Shirase le Japonais est resté longtemps méconnu. Monter une expédition au pôle Sud n’était pas tâche facile pour un Japonais. Car il fallait surmonter l’obstacle psychologique d’un Japon resté fermé au reste du monde jusqu’au milieu du XIXe siècle. S’il échoue dans la conquête du pôle, il rapporte quand même une contribution significative aux sciences polaires : des échantillons géologiques et l’exploration d’un nouvel espace de la Terre d’Édouard VII.

SO : L’aventure avait tout de même un but scientifique ?
Paul Tréguer : Oui, mais là encore, les profils de Scott et Amundsen diffèrent. Même si quelques membres de son équipe étaient formés à l’océanographie et à la météorologie et qu’ils ont rapporté de remarquables données sur l’Atlantique Sud, qui servent toujours de références aujourd’hui, l’objectif d’Amundsen était plus la conquête du pôle que la science. C’était tout l’inverse chez Scott. Des géologues de son expédition ont réalisé les premières représentations en 3D de la Terre Victoria. Des biologistes sont allés en plein hiver, dans des conditions épouvantables, visiter une rookerie de manchots empereurs : ils ont risqué leur vie pour rapporter quelques œufs et tester une hypothèse sur la théorie de l’évolution ! De véritables exploits, surtout si l’on se replace dans les conditions de l’époque.

Trois marins pour un pôle

Paul Tréguer présentera son livre lors d’une conférence à l’Espace des sciences, à Rennes, le mardi 20 avril. 20h30, salle Hubert-Curien,
Les Champs Libres, Rennes - entrée libre.

Nathalie Blanc

(1) Paul Tréguer est professeur émérite de l’Université de Bretagne occidentale. Il est à l’origine de la création de l’Institut universitaire européen de la mer (IUEM).

TOUTES LES ACTUALITÉS

Abonnez-vous à la newsletter
du magazine Sciences Ouest

Suivez Sciences Ouest