Des réglementations que tout oppose ?

N° 295 - Publié le 13 février 2012
© ETHAN MILLER - GETTY IMAGES NORTH AMERICA - AFP
L'arrivée de nouveaux acteurs du Web sur la scène de la télévision conduira-t-elle à un assouplissement de la règlementation de l'audiovisuel ?

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Publicité, droits d’auteur, contrôle des contenus, la télé connectée pose un certain nombre de questions réglementaires.

D’un côté, c’est policé : la publicité ne peut pas se superposer aux émissions (respect de la séparation des écrans), les créneaux sont serrés, voire interdits à certaines heures sur les chaînes publiques. De l’autre c’est la liberté : des fenêtres de publicité en tout genre peuvent s’ouvrir de façon intempestive et la promotion de l’alcool n’est pas interdite. En se connectant, la télévision permet l’accès à des contenus non régulés, piratés ou préjudiciables pour les mineurs. Réunit-elle deux mondes que tout oppose ?

Le poids du téléspectateur

Professeur de droit spécialisée dans les Tic à Télécom Bretagne, Annie Blandin préfère nuancer le propos. « Tout ne les oppose pas, simplement : ils ne sont pas régulés de la même façon. Même si les règles y sont plus souples, Internet n’est pas non plus une zone de non-droit. Par exemple, un socle minimal de règles déontologiques s’applique pour la publicité. Et puis il faut savoir que le CSA(1) est aussi compétent en matière de régulation de services de médias audiovisuels à la demande. » Avec la télévision connectée, l’enjeu consiste aujourd’hui à faire converger ces différences. Anticipant l’émiettement de l’audience et des revenus publicitaires, les chaînes ont adopté, en 2010, une charte commune pour tenter de garder le contrôle sur les contenus. « Elles font face à l’émergence de nouveaux acteurs : ceux venus de l’Internet, mais aussi les constructeurs et même les téléspectateurs ! Car dans le modèle imaginé par certains acteurs du Web, la télé connectée est vue comme une télévision sociale fabriquée par le téléspectateur lui-même », poursuit Annie Blandin. Outre la régulation des contenus, ce nouveau contexte implique la redéfinition de l’application du droit de la concurrence, du droit d’auteur, des chemins de financement de la création...

En avril 2011, le CSA a organisé un colloque pour réfléchir sur ces questions et un rapport sur la télévision connectée, remis au ministre de la Culture en décembre dernier, aborde les aspects réglementaires. Bilan : aucune mesure concrète ne se dessine encore. Faut-il fusionner le régulateur des contenus audiovisuels (CSA) et son équivalent pour les télécommunications (Arcep(2)), ou constituer un comité de liaison entre les deux ? Donner plus de pouvoir à l’Arcep ? « On est tenté par des solutions radicales, mais tant que les usages ne sont pas définis, il est difficile de prendre des décisions. Il est clair en revanche qu’on ne peut pas avancer en se limitant au cadre national. Une démarche à l’échelle européenne me paraît pertinente, notamment à partir de la directive de 2007 sur les services audiovisuels. »

Nouveau circuit de la création

Un sujet de réflexion inhérent à ce nouveau contexte, entamé par l’Europe et suivi aussi par Annie Blandin(3), est la création de contenus par des amateurs. « On cherche à encourager ce type de création car il faut alimenter les réseaux, précise-t-elle. Cela passe, par exemple, par la facilitation de production à partir d’œuvres existantes. » Et donc une modification de la définition des droits d’auteur.

Nathalie Blanc

(1) CSA : Conseil supérieur de l’audiovisuel.
(2) Arcep : Autorité de régulation des communications électroniques et des postes.
(3) Dans le cadre de la chaire européenne Jean Monnet : Union européenne et société de l’information.

Annie Blandin Tél. 02 99 12 70 18
annie.blandin [at] telecom-bretagne.eu (annie[dot]blandin[at]telecom-bretagne[dot]eu)

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