Le cas des huîtres plates
Sinistrée par deux parasitoses, l’huître plate bénéficie aussi de programmes de sélection pour son repeuplement.
Espèce dominante en France dans les années 70, l’huître plate Ostrea edulis a été décimée par deux parasites, le martelia, présent surtout sur l’estran, et le bonamia, qui occupe aussi bien l’estran que les secteurs non découverts. Trente-cinq ans après, ils sont toujours là, provoquant des mortalités importantes entre la deuxième et la troisième année de l’huître. Quelques dizaines d’éleveurs persistent à maintenir une production nationale confinée à environ 1 500 t (pour une consommation de 2 000 t), majoritairement réalisée en baie du mont Saint-Michel par les Cancalais. Sur ce site, l’huître plate subit la concurrence de plusieurs dizaines de milliers de tonnes de crépidules en termes de nourriture. Plus généralement, le nombre d’individus parvenant au stade commercial est peu élevé chez les huîtres plates et l’élevage, qui s’effectue en eau profonde, impose un niveau élevé de mécanisation. Autant de facteurs qui expliquent un prix de revient et donc un prix de vente élevés.
Une volonté de relance
Le Comité régional de la conchyliculture (CRC) de Bretagne Nord avait lancé des programmes de soutien, avec des résultats inégaux. Les deux derniers sont toujours en cours comme l’expliquent Mathieu Hussenot, technicien aquacole au CRC, et Morgane Nédélec, responsable de l’écloserie expérimentale d’Agrocampus Ouest à Fouesnant (Finistère).
Ces deux organismes assurent la contribution française au programme Oysterecover qui associe cinq autres pays, Irlande, Royaume-Uni, Espagne, Danemark et Pays-Bas. « Oysterecover vise à restaurer la production européenne d’huîtres plates en minimisant la principale contrainte, la bonamiose. Il s’agit de mieux connaître le parasite, son cycle de vie et son affection pour cette huître, par des tests sur différents sites. » Le travail consiste à suivre l’évolution de la bonamiose aux différents stades de la croissance.
Un programme interrégional
Dans une logique différente, plus localisée, Perle est un programme d’expérimentation et de recherche sur l’huître plate, soutenu par les Régions Bretagne et Pays de la Loire. Labellisé par le pôle Mer Bretagne, il associe les CRC de Bretagne Nord et des Pays de la Loire, le Smidap, l’Ifremer, le CNRS et l’IUEM de Brest. Le premier CRC conduit l’expérience à partir d’une écloserie située à Hanvec, en rade de Brest. « Nous cherchons à définir la faisabilité du repeuplement en huîtres plates dans le grand Ouest. Le taux de recapture, rapport entre le cheptel récolté (en nombre) et le cheptel semé, est trop bas, seulement 10 % les meilleures années. Or, c’est le seuil de rentabilité pour le producteur », explique Mathieu Hussenot.
L’écloserie produit des naissains à partir d’huîtres récoltées en rade de Brest et en baie de Quiberon, avec l’objectif de trouver des familles présentant un caractère de rusticité prononcé.
Le cheptel est divisé en quatre populations différentes qui sont ensuite croisées et semées à Brest, Quiberon et Bourgneuf-en-Retz sur estran, en eau profonde, en lanternes et dans des marais. « Les travaux portent sur la génétique, la reproduction, le suivi pathologique et l’environnement. Sur ce dernier point, il s’agit de cerner les conditions les plus favorables à la croissance et à la survie. La multiplication des conditions d’élevage vise à favoriser la rusticité... », ajoute Morgane Nédélec. Avec pour objectif final de présenter aux professionnels des options en matière de repeuplement.
Creuse ou plate ?
La production française repose sur deux espèces. L'huître plate (Ostrea edulis) était l'espèce indigène, c'est à dire la seule présente au 20e siècle. La production fut ensuite renforcée avec l'introduction de l'huître creuse dite portugaise (Crassostrea angulata). Ces deux espèces furent décimées par des maladies dans le courant des années 70. Elles sont été remplacées par l'huîte creuse japonaise (Crassostrea gigas), qui s'est répendue dans la nature, devenant indigène.
CRC de Bretagne-Nord, Morlaix (29)
Tél. 02 98 88 13 33
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