De nouveaux traitements ciblés et non toxiques

N° 347 - Publié le 8 décembre 2016
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Les archaeosomes sont plus stables car fabriqués avec des lipides qui ressemblent à ceux des Archaea, des organismes qui vivent dans des conditions extrêmes.

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Pour apporter un médicament (principe actif) à un endroit précis dans le corps, une des stratégies consiste à fabriquer des capsules de transport (ou vecteurs). Ces molécules de transport agissent aussi comme des boucliers pour aider le principe actif à franchir les différentes barrières biologiques du corps (salive, suc gastrique, parois des tissus et organes...) qui pourraient le gêner dans sa progression et même le dégrader.

 

Les transporteurs de médicaments

Les capsules ou vecteurs les plus simples sont constitués d’une double couche de phospholipides naturels, qui s’organisent spontanément en sphère avec un vide au milieu. On les appelle des liposomes. Ils sont peu stables. François CAILLAUD/SAGASCIENCE/CNRS Photothèque
 


Le centre des vecteurs peut accueillir un principe actif (médicament).
François CAILLAUD/SAGASCIENCE/CNRS Photothèque
 

 

 


Photographie d’archaeosomes observés par microscopie électronique à transmission.
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Les hybridosomes, schématisés ici par des sphères colorées, sont des vecteurs qui ont une double fonction : en plus de transporter un principe actif, ils sont aussi visibles en imagerie médicale grâce à des nanoparticules fixées à leur surface. www.antoinegarcia.com
 

 

La fabrication

Pour fabriquer ces capsules, les chimistes peuvent utiliser des lipides, qui forment des liposomes, des polymères de sucres ou d’acides aminés, qui s’organisent en polymersomes, ou différentes nanoparticules (colloïdosomes). Au final, les capsules mesurent entre 10 et 100 nm(1) : elles doivent être assez petites pour franchir les pores des cellules et assez grosses pour contenir le principe actif. À l’École nationale supérieure de chimie de Rennes (ENSCR), Thierry Benvegnu et son équipe(2) travaillent plutôt sur des liposomes particuliers appelés archaeosomes. Ils n’utilisent pas de lipides du commerce mais les fabriquent eux-mêmes sur le modèle de ceux des Archaea, des organismes qui ont des membranes très résistantes dues à leurs conditions de vie extrêmes (température élevée, pH très acide).

La stabilité/La libération

Une fois le liposome construit, tout l’enjeu est d’y introduire le principe actif et d’obtenir quelque chose de suffisamment stable pour arriver jusqu’à la cellule cible (sans le libérer avant, ce qui peut être dommageable) ou pour être conservé avant d’être administré. Une fois le vecteur à bon port, la libération du principe actif se fait assez naturellement dans les cellules, grâce notamment à un phénomène d’acidification.

La sélectivité

Comment la capsule trouve-t-elle sa cible ? Dans le cas du cancer, les scientifiques tirent profit du système : les capillaires sanguins en contact avec les cellules cancéreuses ont des pores plus importants que ceux en contact avec les organes sains pour favoriser l’irrigation nécessaire à la multiplication. Les vecteurs se concentrent donc naturellement près des cellules cancéreuses.
Il y a encore mieux : comme les cellules cancéreuses ont besoin de vitamines pour se multiplier, leur membrane est suréquipée en récepteurs de vitamines. Les chimistes ont donc ajouté la vitamine B9 (d’autant plus intéressante qu’elle n’est pas toxique) à l’extérieur des vecteurs pour qu’ils soient mieux captés. « Nous avons testé ce montage in vivo sur des souris(3) et démontré que cet accrochage grâce à la vitamine B9 augmente le transfert du principe actif, ce qui permet de diminuer sa quantité d’un facteur 30 à l’intérieur », explique Thierry Benvegnu.

Les vecteurs de demain

Thierry Benvegnu et son équipe travaillent aussi sur la sélectivité du principe actif en fonction du type de cancer. Dans le domaine de l’imagerie médicale, d’autres chimistes rennais se sont aperçus que leurs molécules étaient creuses et pouvaient servir de capsules ! Un nouveau type de vecteur est né, permettant de voir les tumeurs avant de les traiter.

Nathalie Blanc

(1) 1 nm = 10-6 m.
(2) ISCR, Chimie organique et supramoléculaire. Cette équipe fait partie de la plate-forme SynNanoVect : www.univ-brest.fr/ synnanovect, dirigée par Tristan Montier, biologiste à l’Inserm/UBO. Lire Sciences Ouest n° 281-novembre 2010.
(3) Dans le cadre d’un projet ANR mené avec l’entreprise malouine Kélia avec un principe actif d’origine marine pour traiter un cas de cancer du côlon.

Rens. : Thierry Benvegnu
tél. 02 23 23 80 60
thierry.benvegnu@ensc-rennes.fr

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