La biodiversité est un pare-feu

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N° 385 - Publié le 7 janvier 2021
NATURAL RESOURCES CANADA COLLECTION
Le nombre d'incendies augmente sur la planète, comme ici au Canada (Red Lake, Ontario).

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Avec le changement climatique, les feux de forêt sont plus fréquents. Une forêt diversifiée, riche de plusieurs espèces de feuillus, résiste mieux aux flammes.

Les feux de forêt dans l’hémisphère Nord ont doublé depuis le début des années 2000 à cause du réchauffement climatique », explique Annegret Nicolai, écologue au laboratoire Ecobio1, à la Station biologique de Paimpont, au cœur de la plus grande forêt bretonne. L’augmentation des périodes de sécheresse et l’élévation de la température favorisent l’inflammation des forêts.

Même la Bretagne est concernée. Quatre incendies majeurs ont détruit des centaines d’hectares dans la forêt de Brocéliande2, de 1975 à 1990. « La forêt, naturellement constituée de lande et de feuillus, a été remplacée par des résineux3 sur la moitié de sa surface. » Or, les résineux sont très inflammables contrairement à une forêt naturelle de feuillus qui résiste bien aux incendies !

Les chênes, les hêtres et les autres feuillus abritent des micro-habitats humides constitués d’humus, de fougères et de feuilles tombées au sol. À l’inverse, les aiguilles génèrent peu de litière et les sols s’appauvrissent. Les coupes réalisées pour l’exploitation du bois créent des trous dans la végétation, exposée alors au soleil et au vent. « Avec le réchauffement global, la forêt s’enflamme plus facilement. »  À Paimpont, c’est le maintien d’une forêt mixte, complété par la mise en place de pare-feu4, qui a permis de réduire le risque d’incendie. Mais l'assèchement des zones humides, tourbières, étangs et ruisseaux, menace aujourd'hui l'ensemble du massif.

Des îlots de végétation résistent

Des incendies expérimentaux ont été réalisés pour comprendre l’action du feu sur la biodiversité présente dans les sols, en particulier celle des acariens. Les chercheurs ont montré que la mortalité des acariens augmente lorsque l’intensité du feu  s’accroît. « Mais il y a toujours des îlots de végétation qui résistent à l’action du feu. » Humides ou ombragées, ces surfaces constituent des sources de recolonisation. Après l’incendie, les espèces ayant survécu retournent peupler les zones détruites. Dans les monocultures de résineux, la faible biodiversité empêche la recolonisation des écosystèmes. Les sols s’érodent et le couvert végétal disparaît. La chercheuse étudie l’effet des incendies sur les forêts, mais également sur les prairies. Celles du Manitoba, au Canada, sont régulièrement enflammées pour lutter contre la prolifération d'espèces invasives. Mais la répétition de ces feux perturbe l’écosystème !

Annegret Nicolai s’intéresse à l’action du feu sur les populations de gastéropodes5 qui vivent naturellement dans ces prairies. « La quantité et la diversité de gastéropodes diminuent si le pâturage est enflammé trop souvent. » Les prairies ne s’autorégulent plus. De ces prairies aux forêts tempérées de notre hémisphère, le maintien de la biodiversité est important. « Il faut trouver un équilibre entre l’action de l’homme et la nature. »

MARIE HILARY

1. Le laboratoire Ecosystèmes, Biodiversité, Evolution est une composante
de l’Osur.
2. Autre nom de la forêt de Paimpont.
3. Majoritairement des pins maritimes, utilisés pour l’exploitation du bois.
4. Zone dans la forêt maintenue ouverte par un broyage régulier, qui permet d'éliminer tout combustible du sol. Le feu s’arrête à cet endroit. Les pare-feu ont été mis en place par la DDTM et le CRPF.
5. Mollusques qui se caractérisent par la torsion de leur masse viscérale, comme les escargots.

Annegret Nicolai , 02 99 61 81 74
annegret.nicolai@univ-rennes1.fr

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