Enseignement et discrimination genrée, où en sommes-nous ?

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N° 405 - Publié le 28 décembre 2022
MATHIEU LE GALL
Cécile Aubron (à gauche) et Cécile Plaud s'intéressent aux inégalités dans l'accès des femmes aux postes à responsabilités.

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De plus en plus de femmes étudient la médecine mais les postes à responsabilités restent majoritairement occupés par des hommes. Enquête sur ce paradoxe.

L’exercice de la médecine se féminise. Aujourd’hui, en première année, 7 étudiants sur 10 sont des femmes. Et dans certaines spécialités historiquement masculines, comme la médecine intensive et réanimation (MIR), la moitié des internes1 sont des femmes. « Mais ces dernières restent sous représentées dans les postes à responsabilités, indique Cécile Aubron, professeure en MIR à l’Université de Bretagne Occidentale et au CHU de Brest. À titre d’exemple, seuls 8 % des professeurs en MIR sont des femmes. »

Une étude sur 5 ans

Face à ce constat, une équipe de femmes médecins en MIR (Femmir) s’est créée en 2019 pour étudier les biais de genre dans la discipline. « L’une de nos enquêtes a montré qu’au début du cursus, les étudiantes ne semblent pas remarquer d’inégalités entre les hommes et les femmes médecins. Ce qui n’est pas le cas de celles en exercice qui constatent l’existence d’un plafond de verre dans l’accès aux postes importants, souligne Cécile Aubron. D’ailleurs, 80 % d’entre elles jugent que la grossesse est un frein à leur carrière. »
Que signifie cette différence de point de vue entre futurs et actuels praticiens ? Est-ce que les étudiantes sont épargnées ? Ou bien les discriminations sont-elles invisibles ? Pour le savoir, le Femmir a lancé l’an dernier une étude nationale2. « L’idée est d’identifier les raisons qui ont motivé les internes à se spécialiser en MIR, de décrire leur représentation du métier de réanimateur ou réanimatrice », explique Cécile Plaud, enseignante-chercheuse en sciences humaines et sociales à l’Ensta3 Bretagne, qui co-dirige l’étude. Un questionnaire a donc été adressé à l’ensemble des internes de première année de MIR. « Il sert à évaluer statistiquement comment la spécialité est perçue selon le genre, au début des études, puis en sortie, poursuit la chercheuse. Nous réinterrogerons chaque interne en milieu et en fin de scolarité et analyserons si au cours des 5 ans de spécialisation, la perception des discriminations évolue et joue un rôle dans les choix professionnels. »

Comprendre les ressentis

Et pour mieux comprendre les ressentis et opinions de chacun, Cécile Plaud interroge les étudiants sur leurs vécus des cours et des stages. L’occasion de repérer si les remarques des enseignants varient selon le genre de l’étudiant auquel ils s’adressent. Cette enquête devrait donc aider à comprendre si l’enseignement est un terreau fertile aux discriminations et, en fonction, d’agir pour plus d’égalité.

MARIE HILARY

1. Étudiants en dernier cycle de formation.
2. En partenariat avec le Collège des enseignants de médecine intensive et réanimation (CeMIR) et avec le soutien financier de la Cité des genres.
3. École nationale supérieure de techniques avancées.

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