Au cœur de la géopolitique

16 mars 2022, la chaîne télévisée Ukraine 24, victime d’un piratage, diffuse une vidéo du président ukrainien appelant à déposer les armes. Ce deepfake très réaliste confirme que l’intelligence artificielle (IA) s’est immiscée dans la politique mondiale. « Il existe chez les dirigeants politiques une sorte de fantasme, devenir le leader en IA, comme dans le spatial ou le nucléaire. Et deux acteurs prétendent sérieusement à ce titre : les États-Unis et la Chine », confie Charles Thibout, chercheur associé à l’Iris¹ à Paris, diplômé de l’Institut d’études politiques de Rennes.

Une arme technologique

L’IA est utilisée pour des opérations d’influence ou de propagande entre États concurrents, mais aussi dans des compétitions entre les partis politiques d’un même pays². « Cette technologie s’alimente elle-même. Elle prend de l’ampleur dans l’espace public, jusqu’à remettre en cause les autorités d’information traditionnelles », précise le politiste. Cette guerre technologique à laquelle se livrent les pays n’a pas de limites. « Une gouvernance mondiale de l’IA n’est guère envisageable. Le droit international n’est plus respecté et le leadership américain s’étiole face à ses concurrents russes et surtout chinois », explique Charles Thibout. Dans cette bataille d’influence, la France est loin derrière et « ne présente pas de réelle stratégie nationale de développement de l’IA, les politiques publiques numériques ne sont pas efficaces », conclut le chercheur.