Le sommeil à l’épreuve des fortes chaleurs estivales

Carte blanche

N° 433 - Publié le 27 novembre 2025
Photo d'un enfant qui dort
© DDIMITROVA/PIXABAY
Portrait de Paquito Bernard
Carte blanche
Paquito Bernard
Chercheur Inserm¹, à l'Institut de recherche en santé, environnement et travail (Irset)

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Le changement climatique a des effets délétères sur la santé des Français, via notamment l’augmentation de l’exposition aux vagues de chaleur, qui sont de plus en plus précoces, longues et intenses ces derniers étés. L’accroissement des températures estivales a des conséquences négatives sur nos modes de vie, de jour comme de nuit. Les vagues de chaleur, l’aménagement du quartier ou encore les caractéristiques du logement dans lequel on vit augmentent le risque de dormir dans une chambre où la température peut aisément dépasser les 28 °C. Ces fortes températures détériorent notre sommeil. On se réveille plus souvent, plus longtemps. On met plus de temps à s’endormir et notre sommeil profond est perturbé.

Risques sanitaires


Les adultes et les enfants qui dorment moins bien du fait des fortes chaleurs nocturnes répétées ont plus de risques à court terme d’être fatigués, de voir leur vigilance altérée et d’apprendre moins bien à l’école. À long terme, un sommeil de faible qualité augmente le risque d’apparition de maladies physiques, comme le diabète, ou mentales, comme la dépression. Des enquêtes françaises2 nous alertent sur les risques sanitaires de la surexposition aux chaleurs nocturnes des personnes précaires vivant dans des bouilloires thermiques (par exemple, dans les logements sociaux anciens). À titre d’exemple, 46 à 51 % des locataires du parc social dans le sud de la France déclarent souffrir depuis au moins trois ans des chaleurs extrêmes dans leurs logements3. Si des efforts nationaux sont actuellement déployés en matière de rénovation énergétique, ils ne sont pas proportionnels aux besoins et surtout, prennent très peu en compte la chaleur d’été. En d’autres termes, il peut continuer de faire très chaud dans un logement rénové. La forte chaleur dans la chambre peut aussi être accentuée par des comportements individuels non-adaptés4 qui accentuent la chaleur (ouvrir les fenêtres la journée) ou l’impossibilité d’aérer la nuit pour diverses raisons : les moustiques, le bruit extérieur, le sentiment d’insécurité pour les étages les plus bas.

Aider à dormir


Chercheurs en santé publique, nous avons tout d’abord vérifié que cet effet négatif de la chaleur de la chambre sur le sommeil se retrouvait dans les études scientifiques internationales5. Puis, nous avons décidé de monter le projet CoolSleep pour aider les gens à dormir l’été. Nous commençons par dialoguer avec des personnes qui vivent dans des bouilloires thermiques pour comprendre ce qu’elles ressentent. Ensuite, nous cherchons le matériel efficace qu’on peut porter ou disposer dans un lit pour se rafraîchir (par exemple, une taie d’oreiller réfrigérée), coller sur une fenêtre de chambre pour limiter l’entrée des rayons du soleil… Enfin, nous organisons des ateliers où se rencontrent des chercheurs, des habitants et des étudiants. L’idée est de favoriser le dialogue pour construire des messages éducatifs et identifier le matériel le plus acceptable et adapté. Ainsi, l’intervention aura plus de chance d’être acceptée. La dernière étape de notre projet consistera à tester l’efficacité de notre intervention pour protéger le sommeil l’été. Pour cela, nous souhaiterions installer des capteurs de sommeil et de chaleur chez les futurs participants et utiliser une application destinée à la recherche pour collecter les données en temps réel. Le changement climatique est amené à s’accentuer et nous développons des interventions que l’on pourra diffuser à large échelle à l’avenir pour « simplement » mieux dormir.

1. Institut national de la santé et de la recherche médicale.
2. Fédération des acteurs de la solidarité, 2024. Analyse de l’enquête canicule.
3. Agence Nationale de contrôle du logement social (2024). 4 ménages sur 10 du parc social souffrent de la chaleur dans leur logement en été.
4. Santé Publique France (2022). Freins à l’adoption des gestes de prévention en période de canicule.
5. Chevance et al (2024). A systematic review of ambient heat and sleep in a warming climate. Sleep Medicine Reviews.

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