Des mousses très spatiales

En août dernier, la navette européenne Discovery décollait de Cap Canaveral, pour rejoindre la station spatiale internationale (ISS), à 700 km au-dessus de nos têtes. À son bord, 72 petits flacons renfermant de l’eau et de l’air, dans lesquels sont ajoutés d’autres ingrédients : du savon, des protéines ou des particules solides. Ils sortent de l’Institut de physique de Rennes (IPR).

Ce sont des expériences sur les mousses liquides, « ces matériaux que tout le monde connaît mais que personne ne comprend », résume Arnaud Saint-Jalmes, physicien à l’IPR. Mousse à raser, shampoing, tous ces produits ont deux ingrédients principaux : l’eau et l’air. « À partir de ces deux fluides, on obtient un nouvel état qui n’est ni un liquide, ni un gaz. Nous voulons comprendre comment c’est possible, ajoute le chercheur. Nous nous intéressons aujourd’hui aux mousses instables, plus complexes, qui retombent rapidement après s’être formées. » Sur Terre, la gravité tient un rôle non négligeable dans cet effondrement. « Elle attire l’eau, plus dense, vers le fond. Dans l’espace, la mousse s’écroulera plus lentement, on pourra isoler et étudier les autres mécanismes en jeu dans cet effondrement. » Ce genre de recherche intéresse les spécialistes de l’espace « pour savoir si là-haut les extincteurs vont fonctionner correctement, par exemple ! »

En 2007 et 2008, les physiciens avaient déjà mené leurs expériences lors de vols paraboliques. Ces “montagnes russes” en avion permettent d’obtenir, à chaque sommet, 20 secondes d’apesanteur. Pour son expérience spatiale, l’équipe collabore depuis la Terre avec Franck De Winne, un spationaute belge parti rejoindre la station en mai pour une mission de six mois. « Il va secouer les fioles pour faire des mousses, puis poser les flacons devant une caméra pour enregistrer leur vieillissement. » Les résultats arriveront sous forme de DVD à Noël, lors du retour sur Terre de Franck De Winne. Un joli cadeau du ciel au pied du sapin.