Des chercheurs rennais ont modélisé le réservoir d’eau chaude et acide qui ronge de l’intérieur la Soufrière.
Lorsqu’on pense aux risques liés aux volcans, l’éruption de magma, éventuellement accompagnée de cendres pour les volcans explosifs, est ce qui vient en premier à l’esprit. Mais ce n’est pas le plus grand risque à la Soufrière, en Guadeloupe. « Il n’y a pas eu d’éruption magmatique depuis environ 500 ans, explique Florence Nicollin, maître de conférences au laboratoire Géosciences Rennes(1), qui l’a étudiée avec ses collègues. En revanche, la dernière éruption phréatique date de 1976 et il y en a plus d’une par siècle. » Ce type d’éruption survient lorsque de l’eau chaude et du gaz sont sous pression dans le volcan. Seuls ceux avec un système hydrothermal développé y sont sujets. C’est le cas de la Soufrière, où l’eau de pluie s’infiltre en abondance et se mélange à des gaz chauds et acides qui remontent de la chambre magmatique.
L’équipe rennaise, avec ses collègues de l’Institut de physique du globe de Paris, a modélisé en 3D ce système hydrothermal. Une première mondiale, qui a été publiée dans Scientific Reports, en juillet dernier(2). Ils ont utilisé la tomographie électrique. Plus de 23000 mesures, collectées sur une période de dix ans ont été nécessaires. La méthode consiste à placer des électrodes sur le volcan, envoyer un courant électrique et mesurer le potentiel entre deux électrodes. On obtient alors la valeur de la conductivité électrique dans une zone du sous-sol. À force de patience et en recoupant les données prises dans un maximum d’endroits, les chercheurs ont réussi à avoir une image précise des différences de conductivité dans le volcan. Ils ont ensuite élaboré un modèle pour expliquer les variations observées, sachant que le système hydrothermal est très conducteur. Celui-ci à une forme de pelle, favorable à un effondrement du dôme. En effet, la circulation de l’eau, chaude et acide, fragilise l’édifice par altération de la roche. Un tremblement de terre, une éruption ou, plus simplement, le poids du volcan, pourraient déclencher un éboulement. Dans le pire des cas, c’est tout le dôme, représentant un volume de plus de 100 millions de mètres cubes de roches qui pourrait s’écrouler en direction du sud, vers les villes de Saint-Claude et de Basse-Terre, au pied du volcan. Il n’est cependant pas possible de savoir quand et avec quelle probabilité cet événement pourrait survenir.
(1) Unité mixte de recherche 6118 (CNRS, Université de Rennes 1 et Observatoire des sciences de l’Univers de Rennes).
(2) Rosas-Carbajal, M. et al, Volcano electrical tomography unveils edifice collapse hazard linked to hydrothermal system structure and dynamics. Sci. Rep. 6 (2016).
Florence Nicollin
tél. 02 23 23 67 84
florence.nicollin@univ-rennes1.fr
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