Les champignons marins sont prometteurs

La mer nous soigne

N° 379 - Publié le 27 février 2020
ERWAN AMICE / CNRS LEMAR
Les champignons marins sont invisibles à l'œil nu. On en trouve dans les sédiments et les coquillages.

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À Nantes, des chercheurs étudient les champignons marins. Leurs molécules sont des pistes pour de nouveaux médicaments.

« Nous pourrions soigner des cancers avec les champignons marins. Il y en a sûrement un qui présente une activité anticancéreuse. Mais nous ne l’avons pas encore identifié ! » Karina Petit est enseignante-chercheuse en pharmacognosie1 à l’Université de Nantes. Dans le laboratoire Mer molécules santé, elle fait partie d’une équipe2 qui étudie les champignons marins et les macro-algues. « Nous cherchons notamment des molécules ayant une activité cytotoxique, c’est à dire toxique pour les cellules. C’est le début du processus pour trouver un médicament contre les cancers. »

En 2011, les chercheurs nantais avaient découvert une molécule inconnue, issue d’un champignon marin présent sur la côte en Loire-Atlantique (Penicillium). Ils l’ont appelée “ligérine”. Mis en culture à grande échelle3, ce champignon s’est révélé actif sur les cellules cancéreuses osseuses. « Des tests sur des souris ont montré que la ligérine diminue le développement des tumeurs »,  explique la pharmacognoste.

Mais cette recherche n’a pas abouti. L’entreprise qui collaborait avec le laboratoire s’est finalement tournée vers d’autres molécules. « C’est frustrant, même si c’est chouette d’avoir réussi à identifier des molécules qui ont montré leur efficacité à plusieurs étapes du processus. Mais cela coûte très cher de les étudier ! Il y a énormément de travail pour passer des tests sur l’animal à ceux sur l’homme. »

Dans l’eau et les sédiments

Quel est l’aspect d’un champignon marin et où le trouve-t-on ? « Il ne ressemble pas à un cèpe au fond de l’eau ! Ce sont des moisissures invisibles à l'œil nu », précise Karina Petit. Ces champignons sont issus de prélèvements d’eau de mer, de sédiments et de coquillages. L’avantage est leur mise en culture facile. Ils peuvent être reproduits en laboratoire à grande échelle, sans endommager les ressources naturelles.

Les spores du champignon se développent, puis chaque souche est évaluée afin de déterminer son activité biologique. Une molécule a-t-elle un effet cytotoxique, neurotoxique4 ou immunosuppresseur5 sur les cellules ? Cette molécule est alors identifiée et purifiée. Le laboratoire Mer molécules santé est pionnier sur ces recherches depuis les années 1990. Chaque champignon est conservé dans une collection, appelée mycothèque. Elle compte entre 800 et 1 000 souches ! Un trésor pour la recherche médicale.

ÉMILIE VEYSSIE

1. L’étude des molécules naturelles ayant une activité thérapeutique.
2. Équipe Chimiodiversité, champignons marins et valorisation (ChiChaMVa).
3. Soit plusieurs litres de culture.
4. Qui détruit le système nerveux.
5. Qui inhibe l’action du système immunitaire pour freiner le développement d’une maladie.

Karina Petit
02 51 12 56 87
karina.petit@univ-nantes.fr

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