Des situations cyber stressantes
La Bretagne, terre cyber
À Vannes, des étudiants en cybersécurité se forment à la gestion de crise. Laurent Guillet étudie leurs réactions.
Un centre hospitalier est victime d’une cyberattaque de grande ampleur. La page d’accueil des écrans d’ordinateur a été piratée et des données personnelles ont été volées. Le dysfonctionnement du réseau met en péril l’activité de l’hôpital. Vingt-huit étudiants de l’Ensibs1, formés à la cyberdéfense2, ont cinq jours pour déjouer une succession d’attaques. Cette situation, similaire aux évènements actuels, n'est heureusement que fiction au Cyber Security Center3 de l’Université Bretagne Sud (UBS) à Vannes.
Étudier le comportement
« Cette simulation a permis d’étudier le comportement des étudiants face à une situation de crise particulièrement stressante », explique Laurent Guillet. Enseignant-chercheur en psychologie sociale à l’UBS, il a filmé durant tout l’exercice4 les élèves et analysé leurs attitudes et leurs échanges. Le but ? Évaluer le stress généré par la situation et repérer les épisodes d’anxiété5.
Deux semaines avant l’exercice, Laurent Guillet a soumis un questionnaire de personnalité aux étudiants et a mesuré leur fréquence cardiaque au repos. Il a ainsi pu déceler les plus anxieux. « Ces premiers tests ont servi de référence pour l’évaluation du niveau de stress et d’anxiété des étudiants en situation. »
Charge mentale et stress
Lors de la simulation, les étudiants ont été répartis en groupes. À tour de rôle, ils ont incarné l’équipe opérationnelle qui déjoue les attaques, l’équipe de renfort et la cellule de management. Le chercheur a évalué en continu la charge mentale et le stress perçu par chacun. « La difficulté augmente au fur et à mesure de l’avancée de l’exercice. L’étudiant se focalise sur la technique. »
C’est ce niveau d’attention qui définit la charge mentale, potentielle source de stress et d’anxiété. « En fonction de sa personnalité et de ses compétences techniques, l’étudiant est plus ou moins stressé. » En effet, une personne anxieuse aura tendance à amplifier ou à créer elle-même du stress. Cette réaction physiologique et psychologique est liée aux ressources que nous avons en chacun de nous, à notre perception de la situation mais aussi au soutien social que nous recevons. L’analyse de Laurent Guillet montre que lorsque la situation se complique, les interactions se réduisent au strict minimum et le soutien social diminue. Se serrer les coudes en cas de coup dur limite l’apparition de réactions négatives. C’est le rôle du manager. Mais ce poste ne convient pas à tout le monde ! « Un référent trop stressé ou peu confiant peut nuire à la cohésion de l’équipe. » Bien connaître la personnalité et le niveau de technicité de ses cyber-agents permet d’optimiser la gestion de la crise.
1. École nationale supérieure des ingénieurs de Bretagne-Sud.
2. Ensemble des mesures permettant la surveillance, l’évaluation de la sécurité et la réaction face à des cyberattaques.
3. Cet espace de 150 m² est équipé de salles high-tech et de plateformes de virtualisation. Il sert à la formation à la gestion de crise cyber pour des étudiants de l’UBS et des entreprises.
4. La simulation se déroule de 8 h à 18 h sans interruption.
5. Le stress est une réaction de tension physique et psychique passagère. L’anxiété est un état émotionnel.
Laurent Guillet
laurent.guillet@univ-ubs.fr
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du magazine Sciences Ouest