Parlons sexe dès l’adolescence

L'adolescence, une crise ?

N° 422 - Publié le 23 septembre 2024
© SOUTH AGENCY / ISTOCK

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Les relations sexuelles sont un sujet qui provoque souvent de la gêne et du malaise chez les adolescents. Pourtant, c’est au cours de ce moment charnière de la vie qu’il est crucial d’en parler.

À l’école, au sport, pendant les vacances et même en ligne, les adolescents passent environ les trois quarts de leur temps avec leurs pairs. « Forcément, à cette période, les relations amoureuses et intimes deviennent centrales, déduit Mathilda Tabeau, psychologue pour adolescents et jeunes adultes à Brest. C’est aussi le moment de nouvelles envies : découvrir l’autre, faire des expériences inédites… Et les questionnements liés à l’identité de genre et à l’orientation sexuelle émergent pour certains. »

Tabou un jour, tabou toujours ?


Si l’éducation à la sexualité à l’école progresse, intégrant notamment la notion de consentement, « elle reste très orientée sur les différentes manières de se protéger lors des rapports sexuels et intervient tard dans la scolarité », rapporte la spécialiste, avant d’ajouter que « la masturbation et le plaisir féminin restent tabous et sont très rarement abordés. »

Dans son cabinet, Mathilda Tabeau constate bien « une libération de la parole » sur les sujets se rapportant à la sexualité, « mais les adolescents ne l’évoquent pas encore de manière spontanée. » D’ailleurs, ils ne sont pas les seuls car ce tabou est largement répandu au sein de la société. « Ce n’est pas plus simple pour les jeunes adultes, mais ils ont un recul plus important sur leurs premiers rapports sexuels, et peuvent qualifier les situations de saines ou non. » Chez les adolescents, les parents ou les adultes de confiance ne sont que très rarement les interlocuteurs privilégiés. Pour parler sexe, on échange entre ados, et beaucoup sur les réseaux sociaux.

Ces derniers sont souvent perçus par les adultes comme un danger pour les plus jeunes. « On s’émeut beaucoup de ce qu’ils font en ligne, mais ce ne sont pas que des choses inintéressantes et idiotes ! plaide Séverine Erhel, chercheuse en psychologie cognitive à l’Université Rennes 2. Il existe des trends1 très instructives, des comptes de vulgarisation, y compris sur les sujets ayant trait à la sexualité. Ils ont aussi accès aux campagnes d’information qui les concernent directement, comme au sujet des violences sexistes et sexuelles. » Pour celles et ceux qui se découvrent une sexualité non-hétéronormée par exemple, les réseaux sociaux sont un moyen de trouver du soutien, une communauté, réduisant ainsi « un sentiment de solitude qui pourrait se développer ».

Parler de consentement


On le sait, Internet ouvre aussi une fenêtre sur les contenus pornographiques auxquels les adolescents, voire les enfants, sont souvent trop exposés, et trop tôt. D’où l’intérêt d’aborder la sexualité, ses mythes et ses tabous. Mais quel est le bon moment, et surtout, dans quel contexte et avec quels mots  ? « À mes yeux, la prévention est essentielle, le plus tôt possible, en adaptant bien sûr le discours à l’âge, estime la psychologue Mathilda Tabeau. Il ne s’agit pas de parler de sexualité dès petit, mais de consentement, de rapport au corps et de ses propres limites, des émotions que l’on ressent. »

Anna Sardin

1. Tendances, sujets de conversation devenus viraux en ligne.

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