Star Wars : l’attaque musicale
En étudiant les partitions des musiques des trilogies Star Wars, Chloé Huvet révèle leur côté obscur.
Une affiche peut orienter une carrière. Celle d’une harpiste avec son instrument a décidé Chloé Huvet à jouer de la harpe, à l’âge de 7 ans. « Je trouvais l’instrument et la gestuelle fascinants, mais je n’en connaissais pas le son ! Il m’a plu tout de suite. » Diplômée du Conservatoire de Paris, elle s’oriente vers l’analyse et l’histoire de la musique comme point central de travaux interdisciplinaires. Fan de Star Wars, elle choisit les trilogies de George Lucas comme objets d’étude pour sa thèse.
Pour encadrer cette thèse, Chloé Huvet sollicite à Rennes Gilles Mouëllic, spécialiste du cinéma et de ses liens avec le jazz, et le musicologue Michel Duchesneau, de l’Université de Montréal. Elle partage son temps entre Rennes et Montréal. De retour en France, elle enseigne depuis septembre 2018 au Conservatoire à rayonnement régional de Perpignan.
L’approche du compositeur
Durant ses quatre années de thèse, Chloé Huvet a comparé les deux premières trilogies Star Wars. La première a été tournée entre 1977 et 1983. La deuxième, réalisée entre 1999 et 2005, narre des événements antérieurs. « J’ai constaté que l’on avait analysé les films et leurs musiques, mais qu’il n’existait pas d’approche comparative des trilogies. » Les musiques sont signées John Williams. Chloé Huvet a étudié comment l’approche du compositeur a été transformée par cette chronologie particulière et par l’usage du numérique pour la plus récente.
L’attaque des clones
Un résultat majeur de la thèse de Chloé Huvet a été obtenu en accédant, fait rarissime, aux partitions de John Williams. « J’ai pu avoir quelques manuscrits de Star Wars. Je les ai comparés à mes propres transcriptions. » La musicologue met en évidence les transformations de la musique entre le manuscrit et le montage final. “Dans L’attaque des clones” par exemple, des musiques extraites du film précédent ont été ajoutées au montage. « La musique devient un matériau dans lequel les monteurs “piochent”. La facilité de manipulation des outils numériques rend cette pratique bien plus fréquente qu’auparavant. »
Lors des scènes d’action dans l’ancienne trilogie, John Williams utilise de grands thèmes. Ils se succèdent en fonction des personnages à l’écran. Cette structure a changé dans la seconde trilogie. D’une part parce que la rapidité du montage ne permet pas de développer des mélodies, d’autre part du fait de la présence plus forte des effets sonores. « Dans la nouvelle trilogie, la musique soutient le rythme de l’action. Elle est composée de motifs très brefs, rythmiques plus que mélodiques. »
Chloé Huvet publiera prochainement sa thèse dans un livre. « Star Wars y sera présenté comme un cas emblématique des blockbusters contemporains. » La jeune chercheuse s’intéresse à de nombreux autres films comme Eyes Wide Shut ou encore Shutter Island... Elle prévoit de se pencher aussi sur la troisième trilogie Star Wars démarrée en 2015.
Chloé Huvet
chloehuvet@gmail.com
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du magazine Sciences Ouest