Pas d’écran avant l'école

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N° 379 - Publié le 27 février 2020
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Regarder les écrans le matin, avant l'école, augmente le risque de troubles du langage, d’après une étude réalisée auprès de 276 jeunes enfants.

Téléphone, tablette, télévision… Regarder les écrans n’est pas bon pour la santé des jeunes enfants. Plusieurs enquêtes l’ont montré. Une nouvelle étude1 établit un lien avec les troubles du langage2. « Les enfants exposés aux écrans le matin, avant d’aller à l’école, auraient trois fois plus de risques de développer des troubles du langage, indique Manon Collet, médecin généraliste à Rennes et auteure de l’étude3. Si l’enfant ne discute avec ses parents que rarement ou jamais du contenu visionné, le risque devient six fois plus élevé. »

Besoin d’une autre personne

Regarder un écran mobilise chez l’enfant son "attention réflexe". Celle-ci lui permet de sursauter ou d’être surpris, quand il entend un bruit inattendu. Mais ce réflexe, s’il est stimulé en permanence, excite et fatigue.

« Le temps d’écran est un moment où l’enfant est seul. Or pour tout apprentissage, notamment celui du langage, nous avons besoin d’une autre personne. C'est pour cela qu'il faut parler avec l'enfant de ce qu'il a vu », précise Manon Collet. Cette étude a été menée en Ille-et-Vilaine sur 276 enfants âgés de 3 à 6 ans. Les enfants étaient répartis dans deux groupes : 167 souffrant de troubles du langage étaient déjà suivis par un orthophoniste, les 109 autres parlant sans difficulté. Un questionnaire distribué aux parents a permis de recueillir les informations sur le type d’écrans utilisés, leur accès, la première exposition dans la journée ou encore l’accompagnement parental.

Les analyses statistiques ont révélé que les troubles du langage sont associés à deux comportements particuliers : d’une part, l’exposition aux écrans le matin, d’autre part le fait de ne pas parler des contenus avec les parents. « Nous n’avons pas établi de liens de causalité. Il faudrait pour cela réaliser une étude de cohorte4 », précise Manon Collet. Aucune association n’a été constatée entre des difficultés de langage et les autres paramètres étudiés, par exemple l’accès aux écrans pendant les vacances ou le soir avant de se coucher.

Alerter les parents

Ces résultats ne surprennent pas Elisabeth Baton-Hervé5. Docteure en sciences de l’information et de la communica-tion, elle est spécialiste des liens entre les enfants et les écrans. « Une cinquantaine de professionnels de la santé de l’enfant, avec qui j’ai échangé, ont constaté des troubles du langage chez les jeunes enfants exposés aux écrans. Et parfois même une absence de communication. Il faut alerter les parents et lutter contre l’abondance de contenus disponibles pour les jeunes enfants. »

Le Conseil supérieur de l’audiovisuel recommande de bannir tous les écrans avant trois ans. Mais ces recommandations sont peu suivies. L’étude de Manon Collet montre que quatre enfants sur cinq sont déjà exposés aux écrans avant deux ans.

ÉMILIE VEYSSIE

1. Publiée le 14 janvier dans le bulletin épidémiologique de l’organisme Santé publique France.
2. Allant du simple retard de langage aux dysphasies de développement.
3. Réalisée dans le cadre de sa thèse en médecine. Soutenue en 2017, elle a été récompensée par le prix Gineste 2017 décerné par la faculté de médecine de Rennes.
4. Groupe de personnes dont la santé est suivie dans le temps.
5. La conférencière Elisabeth Baton-Hervé, qui a obtenu son doctorat à l’Université Rennes 2, a publié en février Grandir avec les écrans (éditions Erès).

Manon Collet
colletmanon@gmail.com

Elisabeth Baton-Hervé
e.batonherve@orange.fr

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