Maladie d’Alzheimer, diagnostics et traitements
Carte blanche
En 1906, Aloïs Alzheimer décrivait les symptômes de la maladie qui porte son nom, mais aussi ses deux caractéristiques histologiques associées, les plaques séniles1 et les dégénérescences neurofibrillaires2. La présence de ces agrégats protéiques est longtemps restée la seule façon de diagnostiquer la maladie d’Alzheimer (MA)… hélas à titre post-mortem. Les diagnostics actuels, basés sur une batterie de tests cognitifs et une évaluation des troubles comportementaux et de l’autonomie des patients, permettent de distinguer les stades préclinique et prodromal (Mild Cognitive Impairment) avant la démence. Ces diagnostics peu quantitatifs ont une part importante de subjectivité. Ces dernières années ont vu de grands progrès dans l’imagerie fonctionnelle du cerveau par résonnance magnétique (IRM) et la recherche d’agrégat d’amyloïdes et de protéine Tau dans le cerveau (Positron Emission Tomography) ou le liquide
céphalo-rachidien, qui permettent de poser un meilleur diagnostic. Les nouvelles approches de diagnostic s’orientent vers l’identification de biomarqueurs sanguins, les scans rétiniens et l’intelligence artificielle. L’objectif de ces approches est d’accompagner le développement de nouveaux traitements et surtout de pouvoir poser le diagnostic le plus tôt possible afin de traiter les patients le plus précocement possible.
Échecs thérapeutiques
Il faut le reconnaître, la MA est un cimetière de médicaments. Des sommes considérables ont été dépensées en R&D, de nombreux essais cliniques ont été arrêtés à des stades tardifs (phases 2 et 3), pour cause d’absence d’efficacité, et les cinq médicaments sur le marché manquent cruellement d’efficacité… au point que leur remboursement ait été remis en cause. On attribue généralement ces échecs thérapeutiques répétés à la mauvaise connaissance des mécanismes moléculaires de la MA et à la focalisation excessive de l’industrie pharmaceutique sur les cibles amyloïdes et Tau. Heureusement, de nombreux chercheurs s’écartent des voies amyloïdes/Tau, des approches très originales voient le jour et de nouveaux traitements, ciblant des voies métaboliques très variées, font leur entrée en essais précliniques et cliniques. Si les pistes amyloïdes/Tau ne sont pas totalement abandonnées, la neuroinflammation, les neurotransmetteurs, les récepteurs prennent de l’ampleur. Molécules de faible poids moléculaire, anticorps, substances naturelles, peptides, enzymes, ADNs et ARNs, stimulation des oscillations gamma, thérapie cellulaire forment l’arsenal déployé dans ces études. Selon deux études récentes3 il y a actuellement 291 produits en développement préclinique, 126 produits en développement clinique (24, 74, 28 en phase clinique I, II, III, respectivement). La grande majorité de ces composés
(82,7 %) vise les mécanismes biologiques sous-jacents à la MA. Les autres cherchent à améliorer les performances cognitives ou à réduire les symptômes neuropsychiatriques.
Trisomie 21
Pour notre part, nous avons sélectionné la kinase DYRK1A comme cible thérapeutique en raison de son implication dans les déficits cognitifs associés à la trisomie 21 et la MA. Nous développons un inhibiteur puissant et sélectif, disponible oralement, la Leucettinib-21, sélectionnée parmi plus de 570 Leucettinibs et plus de 500 Leucettines, toutes inspirées de la Leucettamine B, un produit naturel extrait de l'éponge marine Leucetta microraphis.
1. Dépôts extracellulaires de peptides amyloïdes.
2. Dépôts intracellulaires de protéine
3. Publiées dans Alzheimer’s Dement et Alzheimer's Research & Therapy.
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